Les sentiers de trail, comment ça marche ?
Sans sentiers, pas de trail. Mais d’où viennent-ils, qui les entretient et quels sont leurs statuts ? Plongée dans les coulisses de ces chemins qui rendent notre pratique possible.
En tant que traileurs, nous avons souvent l’impression d’être autonomes, de n’avoir besoin d’aucune installation ou infrastructure pour pratiquer notre sport. Pourtant, comment ferions-nous si les sentiers n’existaient pas ? Qui les a créés ? Qui les balise et les entretient ? Suivez-nous pour tout savoir de ces chemins qui nous ouvrent l’accès à la nature !
En nous interdisant de prendre la voiture pour aller courir là où nous en avions l’habitude, donc dans l’idéal, en fonction de notre lieu de résidence, dans une forêt, le long d’un cours d’eau, ou pour les plus chanceux sur des sentiers de montagne, le confinement nous a forcé à explorer le moindre chemin situé dans un rayon d’1km autour de notre domicile. Et là, le constat a souvent été décourageant, même en milieu rural, beaucoup de chemins s’arrêtent très vite : soit ils mènent à un champ cultivé ou autre propriété privée, soit ils s’embroussaillent et deviennent impénétrables par manque d’entretien.
Cela nous fait prendre conscience du travail que représente la création d’un itinéraire continu et agréable en pleine nature. Hormis en montagne où la verticalité des pentes l’a souvent empêché, la plupart des anciens grands chemins de communication ont été goudronnés pour permettre la circulation automobile… Dans les régions non montagneuses, il a donc fallu une énorme volonté de la part d’associations de randonnée et des collectivités pour conserver des itinéraires préservés des engins motorisés.
Sur quoi suis-je en train de courir ?
Le chemin plus ou moins large qui m’emmène dans la nature peut avoir de multiples statuts… Les voies publiques sont la plupart du temps des routes goudronnées, surtout lorsqu’elles sont nationales ou départementales, mais il existe des voies communales non goudronnées. Difficile dans ce dernier cas, de les distinguer des chemins ruraux qui constituent la plupart des itinéraires de « promenade », mais qui sont, à l'origine, souvent des chemins d'intérêt agricole.
Il faut pourtant savoir qu’autant les voies publiques ne peuvent être aliénées, autant les chemins ruraux, relevant à la fois du droit public et du droit privé du fait de leur appartenance au domaine privé de la commune, peuvent disparaître au profit d’autres aménagements décidés par la commune… Et celle-ci n’est d’ailleurs pas obligée de les entretenir.
Sans le savoir, on est aussi parfois sur des chemins privés dont l'accès aux promeneurs, aux coureurs et autres vététistes, est toléré mais peut être interdit du jour au lendemain. Un cas très particulier est celui des sentiers côtiers pour lesquels il existe une servitude de passage des piétons qui grève les propriétés riveraines du littoral maritime. Cette servitude est une bénédiction pour les traileurs car elle permet le maintien ou la création de magnifiques parcours, souvent techniques à souhait.
Rien n’est simple !
Pourquoi détailler ici toutes ces catégories de chemins ? Pour vous faire comprendre qu’il est souvent très compliqué d’avoir toutes autorisations de passage pour finaliser le tracé d’un trail, surtout en territoire rural à prédominance agricole.
On s’étonne parfois d’avoir à faire un détour incongru ou de passer sur une route alors qu’il existe un chemin parallèle… Avant de critiquer l’organisateur, il est bon de s’informer : il n’a certainement tout simplement pas obtenu du propriétaire, l’autorisation de faire passer sa course sur ce chemin, et ce même si tout un chacun l’emprunte librement tout au long de l’année. Et plus encore que pour faire passer un peloton un jour par an, obtenir de la part d’un propriétaire, l’autorisation de baliser un sentier au sein d’un itinéraire permanent, demande des trésors de patience et des heures de négociation…
Sachez donc que lorsque vous n’êtes pas sur un chemin dûment balisé et signalé, vous êtes au mieux toléré ! Dans certaines régions, la plupart des forêts sont privées et leur accès est souvent interdit… c’est alors le supplice de Tantale pour les traileurs habitant à proximité qui se voient rejetés sur les routes goudronnées en lisière, alors que de jolis singles moussus et souples tentent leurs semelles. Heureusement, en forêt domaniale, l’ONF propose près de 20.000 km de sentiers de découverte et de promenade. A découvrir !
Merci à la randonnée !
C’est à cette activité inscrite depuis fort longtemps dans le top des loisirs sportifs préférés des français que l’on doit la plupart des sentiers présentant une certaine continuité ! C’est grâce à cette pratique, beaucoup plus ancienne que le trail, et à l’énergie de ses pratiquants qui pour beaucoup ne se contentent pas de marcher mais s’investissent aussi dans le balisage et l’entretien des chemins, que l’on doit la qualité de ceux-ci en France, mais aussi en Europe et dans de nombreux pays.

Mais attention, le balisage n’est pas réservé à la randonnée pédestre. Connaître la signalisation et savoir lire les panneaux que vous rencontrez est important pour ne pas vous perdre. Vous rencontrerez en effet aussi bien des marquages d’itinéraires équestres, de VTT, de trail, de pistes de ski de fond ou de raquettes (même en été !), des marques de peinture pour la chasse, pour les bûcherons, etc. Pas toujours évident de faire la différence entre eux, lorsqu’on n’a pas étudié la question au préalable !
Il est déjà bon de savoir que balisage équestre est en orange, et que le balisage VTT est constitué d’un triangle et de deux ronds. En montagne, les cairns, monticules de pierres érigés par les randonneurs pour indiquer le chemin à suivre ou le haut d’un sommet, sont utilisés la plupart du temps là où il n’y a pas de chemin tracé et dans les endroits où le marquage est difficile. C’est souvent le cas dans les pierriers. Ils sont très utiles car ils peuvent être aperçus de loin et évitent de s’égarer par temps de brouillard.
Heureusement, il y a les GR !
Les chemins de grande randonnée (GR) et grande randonnée de pays (GRP) sont entretenus par des baliseurs bénévoles de la Fédération Française de Randonnée Pédestre. Les GR sont balisés avec des traits horizontaux blancs et rouges (5cm de hauteur et 10 de large), et les GRP (souvent en boucle de plusieurs jours) avec des traits horizontaux jaunes et rouges.
Près de 9000 baliseurs bénévoles jalonnent pinceaux à la main, les 94 800 km de sentiers de GR et GRP qui épousent souvent des voies ancestrales et parcourent des sites naturels d'exception. Leur mission les conduit aussi à réhabiliter, aménager, débroussailler, animer les sentiers dont ils ont la charge. Il existe aussi de très nombreux PR : les chemins de Promenade et Randonnée (ou Petite Randonnée), itinéraires d’une durée maximale d’une journée, balisés d’un trait jaune. En dehors de ces itinéraires « officiels » signalés en respectant une certaine norme (les baliseurs bénévoles suivent même des formations en ce sens), le balisage peut s’avérer très atypique, surtout à l’étranger. Soyez-y préparés lorsque vous partez à l’aventure !
Sans ces réseaux d’itinéraires souvent invisibles, hérités de traditions séculaires ou façonnés par des passionnés bénévoles, notre pratique du trail ne serait tout simplement pas possible. Derrière chaque sentier, il y a des heures de marche, de peinture, de négociation, parfois de conflits d’usage aussi. Prendre conscience de cette réalité, c’est aussi apprendre à courir autrement : avec respect, curiosité, et pourquoi pas un peu de gratitude pour celles et ceux qui tracent le chemin.